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JDH interviewe Louis Thannberger

Article du 14/02/2016
Aujourd'hui, en pleine débâcle boursière, ce n'est pas un chef d'entreprise que notre Rédacteur en Chef interroge mais "le pape de l'introduction en bourse", Louis Thannberger. Entre mémoires, réflexion et prospective...

JDH : Mr Thannberger, vous êtes un homme qui a fait l’histoire. Pouvez-vous nous rappeler combien de sociétés avez-vous introduit en tout, directement ou indirectement dans votre carrière ?

LT : A ce jour, j’ai détecté plus de 400 entreprises au total, un peu partout en France et même 10 en Chine, avant de les conduire en Bourse, ce qui constitue un record du monde. Mais, le plus important est que parmi ces 400 TPE au départ, 200 sont devenues des PME, 80 env. des ETI. 10 milliards d’euros de richesses nouvelles ont ainsi été créées dont ont profité les métiers de la finance certes, mais aussi d’autres. Quand on lit çà ou là que les entreprises cotées partout dans le monde avancent plus vite que celles qui ne le sont pas et deviennent de plus en plus compétitives, la preuve de ce que j’avance est faite.

JDH : Aujourd’hui, si j’ai bien compris vous êtes en quelque sorte courtier en introductions, est-ce exact ?

LT : Courtier n’est pas vraiment le mot, encore que, au temps jadis, la Bourse de Paris fonctionnait sous l’égide des courtiers de la Coulisse d’un côté, et des agents de change, officiers ministériels du Parquet de l’autre.
Les courtiers étaient particulièrement dynamiques, ce sont eux qui ont amené le plus de nouvelles entreprises vers ce marché d’acclimatation qu’était alors la Coulisse. En vérité, je reviens tout simplement à mes premières amours. Aujourd’hui, nous fonctionnons comme un cabinet d’architecte, à l’horizontale et non pas en silo. En clair et porteur du projet d’introduction en Bourse dans sa globalité, IPO N° 1 fédère les meilleurs dans chaque discipline à savoir : la prospection, la sélection, la communication surtout, etc... Ceci étant, nous ne nous situons que d’un seul côté, celui de l’entreprise et de son propriétaire, nous ne gérons donc aucun conflit d’intérêts.

JDH : Que pensez-vous de l’engouement qu’il y a eu ces deux dernières années sur l’introduction des biotechs ?

LT : En Bourse, il y a toujours eu des phénomènes de modes, les biotechs en font partie. Certaines vont prospérer, d’autres vont être vendues ou disparaître. C’est ainsi, on n’y peut rien. Ceci étant, puisse la plupart d’entre elles, faire bon usage des capitaux que la Bourse a mis à leur disposition le 1er jour... l’argent est un très bon serviteur, mais souvent un très mauvais maître.

JDH : La crise qui se profile va-t-elle, selon vous, ralentir le rythme des introductions ?

LT : Il n’y a pas de crise. Michel Serres dit : « C’est un monde nouveau qui nous fait face ». Le rythme des introductions en bourse peut se ralentir momentanément certes, mais le fait est qu’elles ne s’arrêteront plus, le financement des entreprises et singulièrement des entreprises moyennes, passera chaque jour un peu plus par le Marché, davantage que par le crédit. J’ajoute que pendant les périodes de bas de cycle, comme celle que nous vivons en ce moment, une entrée sur le Marché Libre en vue d’une acclimatation progressive d’une TPE au marché financier est particulièrement adaptée. De ce point de vue, l’entrée en bourse récente sur le Marché Libre de Drone Volt, sert d’exemple.

JDH : A propos de cette prétendue crise, boursière du moins (1400 points de baisse sur le CAC 40), l’imaginez-vous profonde ? Durable ?

LT : Une TPE et/ou PME n’est pas vraiment influencée par le Cac 40 tout simplement parce que sa croissance est la plupart du temps plus vive que celle d’un grand groupe. Si, de surcroît elle a été présentée au Marché sur la base d’une évaluation raisonnable, elle a l’avenir devant elle. La Bourse est une affaire de crédibilité croissante. Rien n’est pire que de surévaluer une entreprise au départ et de procéder à une levée de fonds excessive. A cette occasion et à la première alerte, le cours plonge. A l’heure où sont écrites ces lignes, la majorité des entreprises qui ont été introduites en bourse depuis 2 ans se retrouvent en-dessous de leur 1er cours coté, ce qui est fâcheux. On n’attire pas les mouches avec du vinaigre, sans compter que la confiance par au galop et revient à pied.

JDH : Vous avez beaucoup œuvré sur le marché libre. Aujourd’hui ce marché est tombé en désuétude en raison de nombreux dépôts de bilan (Golog, etc). Quel est son avenir selon vous ?

LT : Il y a toujours eu des accidents en bourse et ce sur tous les compartiments. Un visa AMF n’est pas une garantie tout risque, il n’y a pas de Bourse sans risque, souvenons-nous du Nouveau Marché qui au début des années 2000 a vu disparaitre 130 des 170 entreprises de la nouvelle économie qui sont entrées sur ce segment. Pour des raisons trop longues à expliquer, le Marché Libre de 2016 est à peu près l’équivalent du Second Marché en 1983, la plus grande révolution financière à l’époque et ce depuis les années 50.
Le Marché Libre présente aussi l’avantage d’accueillir tous les secteurs d’activités. Une Bourse, pour durer dans le temps, ne peut pas se contenter d’accueillir les seules biotechs et autres hight-techs. Une place financière qui ne renouvelle pas sans cesse son tissu boursier est une place financière morte.
Plus prosaïquement, le Marché Libre incarne aussi un peu les bourses régionales à Paris, des bourses régionales qui ont disparu hélas ! Le Marché Libre c’est aussi la Bourse pour apprendre, la Bourse pour comprendre, un vivier formidable en tout cas, permettant aux TPE/PME après une entrée en bourse en douceur de se transférer sur un Marché régulé ou réglementé. Toutes les places financières du monde abritent un Marché Libre à commencer par New York avec son célèbre Over The Counter (OTC, ndlr). Si, le Marché Libre accueillait 100 TPE par an, la Place serait hors de danger. 25 au total pour Euronext et Alternext, ce n’est pas suffisant. Le Marché Libre, c’est aussi du crowdfunding coté.

JDH : Je me doute que vous êtes fier de toutes vos introductions. Mais pouvez-vous nous en citer quelque unes qui vous ont particulièrement marqué et dont vous êtes particulièrement fier ?

LT : Je suis fier de toutes les introductions en bourse que j’ai conduites, fier de la confiance dont m’ont honoré des centaines de chefs d’entreprises en France, et qui continuent au demeurant ! C’est ma part de légitimité. Ma passion aujourd’hui, est de détecter toute une nouvelle génération d’entrepreneurs exerçant des métiers qui souvent n’existaient pas il y a 4 ou 5 ans. C’est l’heure de la relève, parmi eux vont éclore à n’en pas douter de nouvelles locomotives qui seront ô combien nécessaires pour notre pays demain, si, d’aventure nous voulons un jour rivaliser avec l’Allemagne et ses ETI qui sont au nombre de 12 000 contre 4000 pour la France. Ceci étant, je n’oublie pas : Jean Michel Aulas, Bruno Paillard (Champagne Lanson), Thierry Ehrmann (Artprice.com), Jean-Claude Darmon, et tant d’autres, la liste est trop longue.

JDH : En quelques phrases, comment voyez-vous la Bourse de Paris dans 5 ans ?
LT : Dans Les Echos d’il y a quelques semaines, un éditorialiste titrait ainsi : « Paris doit rester une Place boursière ». Est-ce à dire qu’elle risque de ne plus l’être ? Une chose est sûre, le problème ne se pose ni à Londres, ni à New York, ni à Shenzhen, dont le dynamisme est impressionnant.

JDH : Pour finir cet entretien, une question plus personnelle : si c’était à refaire, referiez-vous de la même manière ou différemment ?
LT : La Bourse ou la vie, et la vie est un éternel recommencement…

JDH : Merci Louis Thannberger pour cet entretien exclusif

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