Présidentielle : Ségolène Royal multiplie les chinoiseries
Article du 08/01/2007
Pour son séjour en Chine, Ségolène Royal a choisi le blanc. Et c’est toute de blanc vêtue qu’elle apparaît sur les photos, tantôt arpentant la Cité Interdite, tantôt sur le chemin de ronde de la Grande Muraille. Couleur de la pureté, du changement dans l’Occident, le blanc est en Chine la couleur du deuil. La preuve s’il en fallait une, écrit la presse française du jour, que ce voyage en Chine s’adresse avant tout aux Français.
Mais ce n’est pas tant la garde-robe de la candidate socialiste qui a soulevé l’émoi ce week-end que certains de ces propos. La candidate a pris dans ses valises un petit livre bleu, un Dictionnaire des locutions et proverbes chinois, qui ne la quitte depuis son arrivée. Ainsi pendant sa visite au pas de course de la Cité Interdite a t-elle lancé : « cela m’inspire un proverbe chinois. Un coup d’oeil vaut parfois mieux que des centaines de commentaires. »
En visite sur le monument de la Grande Muraille (une dizaine de minutes seulement par – 7 degrés et bravant le vent) : « comme le disent les Chinois, un Chinois qui ne vient pas sur la Grande muraille n’est pas un brave et un Chinois qui vient sur la Grande muraille conquiert la bravitude. » Lapsus, chinoiserie, provocation ?, s’interrogent les commentateurs politiques français et même les proches de Ségolène Royal. « Je pense que ce qu’elle a voulu exprimer c’est la plénitude de la bravoure (...) c’est-à-dire quelque chose de plus que la simple bravoure », a commenté Jean-Louis Bianco, son co-directeur de campagne, interrogé sur Canal Plus. « Au moins, ça nous fait parler et ça attire l'attention sur un proverbe chinois. »
Un peu jaloux, Jack Lang a déclaré dimanche au Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro : « j’aurais aimé inventer ce beau mot (…) Il exprime la plénitude d’un sentiment de bravoure. » Ajoutant même : « l’inventivité sémantique fait partie de la capacité d’un candidat à parler une autre langue que la langue de bois. Ségolène Royal parle une langue qui touche le coeur des gens. »
D’aucuns ont vu dans ce néologisme une tentative malheureuse de coller à une autre expression qui avait fait parler d’elle en son temps : la « positive attitude » de l’ancien Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, directement inspirée d’une chanson de Lorie.
Jeux de mots
Autre vocable propre à la candidate. Concernant l’épineuse question des droits de l’homme en Chine, Ségolène Royal a préféré parler de « droits humains ». La raison de cette expression : développement économique, protection de l’environnement, droits sociaux, droit de la défense, droit à l’information, au travail … tout est lié selon elle. « Chaque fois que l'environnement progresse, ce sont les droits sociaux et les droits individuels qui progressent. »
Là encore, les commentaires ont été nombreux. Pour son rival UDF, François Bayrou interrogé sur Europe 1, elle a exprimé son point de vue sur les droits de l'homme « avec tant de périphrases et de délicatesse que nul ne s’en trouve troublé ». Et d’ajouter : « l’organisateur du voyage, c’est le Parti communiste chinois. C’est une attitude soumise que je considère ne pas ressembler à ce que devrait être l’attitude d'un défenseur français des droits de l’homme et des principes de liberté. »
A ce sujet, Ségolène Royal a rappelé, dans la cour de la Cité Interdite, l’importance du respect des règles internationales, qu’a signées la Chine. « Si on veut un développement harmonieux de la planète et qu’il n’y ait pas de concurrence destructrice des emplois, y compris en France, il faut que les règles sociales et de respect de l’environnement, dans lesquelles des pays comme la Chine se sont engagés formellement, soient effectivement appliquées. »
Aujourd’hui, la « rose de France », comme l’a surnommée le China Daily, devait rencontrer le vice-président chinois, Zeng Qinghong – mais pas le numéro un chinois, Hu Jintao – et plusieurs ministres. Ces rencontres devraient être l’occasion de parler de cinq avocats et journalistes chinois emprisonnés pour dissidence, sujet auquel tient Ségolène Royal. Ségolène Royal aura aussi profité de ce week-end pour rencontrer la société civile chinoise, même si tous les représentants d’associations de défense de l’environnement n’étaient pas au rendez-vous et même si de la visite d’une association qui fournit de l’aide juridique aux femmes venant des campagnes pour travailler en ville est ressortie une présentation un peu trop idyllique pour être totalement réelle. Elle aura également visité les sites en construction qui devraient accueillir les prochains Jeux Olympiques en 2008 et aura passé quelques heures en compagnie d’étudiants chinois.