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EADS : Les révélations tournent au scandale d'Etat

Article du 04/10/2007

Les révélations sur de possibles délits d'initiés de la part de hauts dirigeants du groupe européen EADS ont rapidement pris l'allure d'un scandale d'Etat en France, où le gouvernement était sommé jeudi de faire la lumière sur le rôle joué par les autorités.
L'Etat "ne s'est prêté à aucune manoeuvre" dans l'affaire de présomption de délit d'initié à EADS, a affirmé jeudi au Sénat le Premier ministre François Fillon, pour qui il s'agit de "faits très graves".
"Il va de soi que l'Etat ne s'est prêté en aucune façon à une manoeuvre supposée, dont l'enquête prouvera ou non l'existence, sur la liquidation d'actions par des porteurs privés"
, a-t-il déclaré, en réponse à une question d'un sénateur socialiste.
L'Etat n'est pas intervenu "pour une raison simple", a poursuivi M. Fillon: "c'est qu'il y avait un pacte d'actionnaires curieux, qui avait été négocié sous une autre majorité et qui privait l'Etat français et l'Etat allemand de tout droit d'intervention sur les affaires d'EADS".
"Les faits qui sont reprochés à certains dirigeants d'EADS sont très graves"
, a déclaré également François Fillon, "et c'est justement parce qu'ils sont très graves que nous devons faire preuve de retenue dans nos commentaires et respecter les procédures judiciaires".
Le président de la commission des Finances du Sénat, Jean Arthuis (UDF), a indiqué jeudi à l'AFP qu'il allait organiser une série d'auditions publiques sur l'affaire EADS à partir de mercredi, dont celle de l'ancien ministre des Finances Thierry Breton.
Le président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), Michel Bouvard, et le directeur général de la CDC, Augustin de Romanet, seront entendus les premiers, mercredi matin.
Seront également auditionnés Thierry Breton et son ancien directeur de cabinet, Gilles Grapinet, ainsi que Bruno Bézard, directeur de l'Agence des participations de l'Etat (APE). Le calendrier de ces auditions n'a pas encore été complètement arrêté.
Venant des syndicats comme du patronat, de la droite comme de l'opposition de gauche, les appels se sont multipliés pour que les éventuels coupables soient rapidement poursuivis et sanctionnés.
"Si l'Etat savait et a laissé faire, s'il a laissé vendre les uns et acheter les autres, alors nous sommes en présence d'une affaire d'Etat", a assuré le leader du Parti socialiste François Hollande.
La presse française était à l'unisson pour estimer elle aussi que tous les ingrédients d'une "affaire d'Etat" étaient réunis sur les agissements de la maison mère d'Airbus et de ses actionnaires, parmi lesquels l'Etat français, qui possède 15% du capital d'EADS.
L'Autorité des marchés financiers (AMF, le "gendarme" de la bourse) a transmis à la justice française un rapport, révélé mercredi, potentiellement dévastateur: 21 responsables d'EADS ont vendu fin 2005-début 2006 de gros paquets d'actions peu avant l'annonce de retards de livraison de l'avion géant A380, qui ont plongé Airbus dans une crise profonde et fait chuter les cours.
"Les protestations des uns et des autres n'y changeront rien: il est désormais établi qu'au sommet de la pyramide, de la direction de l'entreprise aux grands actionnaires, en passant par les Etats français et allemand, tout le monde connaissait les difficultés à venir d'Airbus", écrivait jeudi le journal Le Figaro.
Dans la ligne de mire figurent les principaux actionnaires privés du groupe, le Français Lagardère et l'Allemand DaimlerChrysler, qui ont vendu chacun 7,5% du capital en avril 2006, au plus haut, pour 2 milliards d'euros chacun.
Le gouvernement français a affirmé n'avoir bénéficié d'aucune information privilégiée, en soulignant pour preuve de sa bonne foi que l'Etat ne s'est débarrassé d'aucune action EADS.
Mais les explications de la ministre de l'Economie Christine Lagarde et de son prédécesseur Thierry Breton n'ont pas convaincu M. Hollande, qui a appelé l'Etat à "faire toute la transparence". Le chef de l'opposition s'est notamment étonné du rachat des titres de Lagardère et DaimlerChrysler par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), un organisme public qui a ainsi acquis des titres sur le point de chuter.
Un des responsables de l'UMP, Patrick Ollier, s'est dit "personnellement convaincu" qu'il y avait bien eu délit d'initiés, souhaitant que leurs auteurs soient "sanctionnés". Il a en revanche estimé que l'Etat avait "été parfaitement dans son rôle".
"Si ces faits sont avérés, je n'ai que du mépris pour des gens qui se comportent ainsi", a lâché de son côté la présidente du patronat français Laurence Parisot, consciente des effets désastreux d'une telle affaire sur une opinion publique largement favorable à une régulation des stocks options.
Côté allemand, l'ancien coprésident du conseil d'administration d'EADS Manfred Bischoff a affirmé jeudi n'avoir jamais vendu d'actions du groupe.
A l'instar de ses homologues français, le syndicat IG Metall a exigé lui aussi que la lumière soit faite rapidement alors qu'Airbus fait face à un plan de restructuration prévoyant 10.000 suppressions d'emplois.
Pourtant, aux yeux de la bourse, l'avionneur est déjà sorti de la crise avec un carnet de commandes bien rempli et la première livraison prévue le 15 octobre de son A380. Le titre EADS s'affichait donc en nette hausse jeudi à Paris.
A l'inverse, celui du groupe Lagardère, désormais sous la menace d'une lourde sanction financière de la part de la justice, continuait de chuter après avoir perdu plus de 5% de sa valeur la veille.



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