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Au bord de la faillite ?

Article du 25/09/2007
En chantre de l’orthodoxie financière, François Fillon persiste et signe. Après avoir lâché le mot « faillite » vendredi, lors d’un déplacement en Corse, pour qualifier la situation budgétaire de l’Etat, le Premier ministre a réaffirmé hier que la situation des finances publiques était « critique » et « plus supportable », sans toutefois reprendre le terme critiqué de « faillite ».
Les propos de François Fillon portent en effet à polémique. D’un côté, il y a ceux qui acquiescent cette analyse, notamment l’ancien Premier ministre de droite, Edouard Balladur. De l’autre, ceux qui estiment que le mot est un peu fort pour rendre compte d’une situation certes difficile mais pas irrattrapable, qu’ils soient dans la majorité ou dans l’opposition.
Pour le chef du gouvernement actuel en tous cas, le verdict est sans appel. La France n’a plus eu de budget en équilibre « depuis 1974 », a-t-il affirmé hier matin sur RTL, et l’Etat a été réduit à emprunter « pour financer ses dépenses de fonctionnement ». « On a 1 150 milliards de déficit (dette publique cumulée, ndlr) à la fin de 2006. C’est une situation qui n’est plus supportable », a déclaré le Premier ministre.
« N’importe quel chef d’entreprise, n’importe quel chef de famille, n’importe quel agriculteur comprend qu’on ne peut pas continuer à emprunter pour financer des dépenses de fonctionnement », expliquait hier François Fillon.
« La France est un pays riche, qui a heureusement des ressources qui lui permettent de faire face à l’avenir. Mais l’Etat est dans une situation critique » et doit se réformer « sous peine de continuer à peser de plus en plus lourdement sur l’activité des Français, sur leur croissance et sur leur emploi », a-t-il encore déclaré.
Une analyse qui a donc évité hier l’emploi du terme « faillite » que François Fillon avait utilisé comme « image » et dans ses deux acceptions : « un sens financier et un autre sens, qui est l’échec d’un système ».
Une vision dans la continuité de la réponse du Premier ministre actuel à son prédécesseur Dominique de Villepin qui l’accuse d’avoir encore creusé la dette en privant l’Etat de 15 milliards de recette avec le paquet fiscal. Pour François Fillon, l’effet du paquet fiscal se monte à « 9 milliards de recettes fiscales en moins » en année pleine pour l’Etat et non 15. Le ministre de l’Economie, Christine Lagarde avait chiffré le coût de ces mesures à 11 milliards par an.

A boulets rouges : les réactions aux propos de François Fillon

L’analyse de François Fillon fait depuis vendredi couler beaucoup d’encre dans les médias. Et réagir nombre d’hommes politiques.

Aux côtés du Premier ministre, on trouve Edouard Balladur (UMP) qui a approuvé hier, sur LCI, les propos de François Fillon. « Il faut redresser la barre et j’approuve François Fillon de le faire », a-t-il déclaré. « Nous devons impérativement remettre de l’ordre dans nos finances publiques, c’est-à-dire restreindre les déficits ».
Dans les rangs de l’UMP, tous ne sont pas complétement de cet avis. Pour le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, Gilles Carrez (UMP), si le Premier ministre « a raison d’insister sur la mauvaise santé de nos finances publiques », on ne peut parler de « faillite », a-t-il nuancé sur RMC, expliquant que « le mot faillite est un mot choc ».
Un autre ancien Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a estimé sur France Inter que le mot « faillite » était « maladroit et inexact ». Le sénateur de la Vienne a ajouté : « Rigueur, guerre, faillite. Franchement, attention ! »
Ce matin, c’était au tour de Jean-François Copé (UMP) de défendre son action comme ministre du Budget du gouvernement Villepin et indiqué qu’il « n’aurait pas employé » le mot de « faillite ». « Mais il est vrai qu’on ne peut pas échapper au principe de vérité (...) Ce n’est pas une prise de conscience récente », a indiqué sur RTL le président du groupe UMP à l’Assemblée nationale.
Jean-François Copé a ajouté avoir, comme ministre du Budget, lancé « une radiographie complète » des dépenses publiques « pour traquer les dépenses inutiles et moderniser l’Etat ».
« Lorsque Lionel Jospin est parti du gouvernement en 2002, le déficit budgétaire de l’Etat, c’était 49 milliards. Fin 2006, nous étions à 36 milliards, soit 13 milliards de moins. Donc, on ne peut pas dire que de ce point de vue, le déficit de l’Etat n’a pas été fortement diminué »
, a-t-il cependant fait valoir.

Dans l’opposition, Stéphane Le Foll, directeur de cabinet de François Hollande au PS, n’a pas manqué de souligner que « la droite a mal géré ce paysz et gère mal ce pays ».
« Le principe de la droite depuis 2002, c’est qu’elle s’est engagée chaque fois à baisser les impôts pour servir des clientèles »
et que « ce sont tous les Français qui doivent ensuite payer la facture ». Une facture qui ne cesse par ailleurs de s’alourdir.
L’ex-Premier ministre socialiste Lionel Jospin a jugé « un peu étrange » qu'un chef de gouvernement prononce de tels propos, accusant en outre la droite d’avoir fait « exploser la dette » depuis 2002.
Le centriste François Bayrou a vu pour sa part dans la sortie de François Fillon « un aveu estomaquant » alors que la gouvernement a mené notamment selon lui « une politique laxiste et injuste » avec des allègements fiscaux depuis sa nomination.

D’autres sont encore plus réticents à l’emploi du terme même de « faillite ». Du côté des économistes français, parler de faillite n’a « techniquement » « pas beaucoup de sens », a estimé samedi Elie Cohen sur France Info, car « pour qu’un pays soit en faillite, il faudrait qu’il ne puisse plus emprunter sur les marchés internationaux ». Or « les prêteurs se bousculent pour prêter de l’argent à la France ».
En outre, la France est « beaucoup moins endettée que le Japon » où la dette a atteint 186 % du PIB en 2006 « et personne ne dit que le Japon est en faillite », a observé l’économiste.
Pour autant, la France a accumulé des déficits et de la dette. Une situation qui a un « coût », note Valérie Rabault, membre du Collectif économiste pour l’action politique (Cepap).
Le « service de la dette », c’est-à-dire le remboursement des intérêts annuels des sommes empruntées, dépasse 40 milliards d’euros chaque année, ce qui en fait le deuxième poste budgétaire, juste derrière l’Education nationale. Et le montant des intérêts à rembourser pourrait encore s’alourdir de 800 millions d’euros par an, selon Valérie Rabault.
Et comme la croissance ralentit, « il va falloir serrer la dépense » et « imaginer un budget beaucoup plus strict que prévu pour 2008 et encore plus pour 2009 », ajoute Elie Cohen. Une vision quelque peu contraire aux récentes mesures gouvernementales « très vigoureuses de réduction de la dépense » telles que le paquet fiscal.
Pourtant, à Bercy, « on a une maîtrise sans précédent des dépenses publiques », assure le ministre du Budget et des Comptes publics, Eric Woerth, sur Canal +.

Francebourse.com – Alexandra Voinchet, avec AFP
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