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La publicité pour la grande distribution à la télévision : évolution ou révolution ?

Article du 04/12/2006
Le premier jour de l’année 2007 sera également celui d’une nouvelle ère pour les professionnels de la publicité et de médias. En effet, le 1er janvier prochain, devraient apparaître sur le petit écran des foyers les premiers spots télévisés vantant les mérites des grands distributeurs français, Carrefour, Auchan…
Pour l’heure, les grands enseignes de distribution doivent encore se contenter de publicité radio ou dans la presse locale et régionale. L'accès des enseignes à la publicité télévisée sur les chaînes hertziennes va certainement donner lieu à une bataille acharnée entre les marques et les médias. En 2005, les montants publicitaires se sont tout de même montés à 2,3 milliards d’euros bruts.
Le contexte est également bien spécifique : les cinq premières enseignes de distribution représentent 60 % de la grande distribution française. Le marché total 2002 de la distribution représente environ 322 milliards d'euros au total. Les enjeux financiers de la nouvelle accessibilité de la télévision sont donc énormes.

Quelles en seront les conséquences immédiates ?
Au Royaume-Uni déjà, le recours à la publicité télévisée est entré dans les mœurs. Dans l'ensemble de l'Europe, la télévision détient une part de marché moyenne de 25 % des dépenses publicitaires de la distribution, selon le Sénat. La puissance de la radio et de la presse écrite (PE), sur la distribution comme sur l'ensemble du marché publicitaire, constituent des "exceptions françaises", qui résultent sans doute assez largement de l'interdiction de la publicité télévisée.
Ce sont d’ailleurs ces deux secteurs qui, en France, devraient le plus pâtir de cette révolution culturelle. Vu que les grands distributeurs n’ont pas choisi d’augmenter leur budget communication, on peut s’attendre à un transfert massif de dépenses qui va se faire en faveur des régies télévisées, au détriment de la radio, de la presse et de l'affichage.
La presse quotidienne régionale pourrait bien voir ses recettes publicitaires s’effondrer. Une inquiétude quand on sait que la PQR doit une partie de sa survie à la manne publicitaire. Les enseignes Leclerc et Lidl sont les premiers annonceurs de la PQR. La distribution représente 25 % des recettes publicitaires de la PQR.
Certaines études prêchent l’optimisme : selon la société d'études Bipe, la manne dont bénéficiera la télévision se fera, certes, au détriment des autres médias mais ce transfert, estimé à 400 millions d'euros brut n'affecterait pas la presse nationale - peu utilisée par les grandes surfaces - et que faiblement la PQR et la presse magazine.
De manière plus globale, l'arrivée des distributeurs à la télévision risque de provoquer une saturation des écrans publicitaires et par suite une inflation de leur prix (déjà une hausse de 5,6 % en 2006).

Des cafouillages à venir
Cette nouveauté a alimenté au cours de l’année 2006 bien des discussions réglementaires entre les différents acteurs en présence, le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, le Bureau de Vérification de la Publicité et l’Etat. Pour éviter les cafouillages entre communication autour de l’image et communication commerciale (autour d’un produit, d’un événement ponctuel), le décret du 27 mars 1992, modifié par le CSA en 2004, réduit l'utilisation du média télé aux campagnes d'image, tout ce qui relève de l'opération de promotion continuant d'être dévolu aux autres supports. Reste que tout n’est pas clair : l'ouverture d'un magasin en nocturne ou le dimanche, si elle est régulière, peut être vantée à la télévision, mais pas si elle n'a lieu que pour les achats de Noël ! Ainsi une enseigne ne peut-elle communiquer sur le prix de son foie gras entre Noël et le jour de l'An. En résumé, dès qu'un avantage commercial s'inscrit dans la stabilité et la durée, c'est-à-dire au-delà de "quinze semaines de maintien", il ne relève plus de la "promotion". Les radios et la presse régionale conserveront ainsi leur fonction de support privilégié en matière d'annonces "temporaires" sur les prix. Selon Vincent Leclabart, PDG d'Australie, l'agence publicitaire de Leclerc : "plus de 80 % à 85 % des investissements en communication de la distribution portent sur les promotions (…) l n'y aura pas de raz-de-marée en télévision. Les distributeurs sont pragmatiques. Ils ne vont pas arrêter ce qui marche, c'est-à-dire la promotion".
De la même manière, il est interdit à un hyper de faire savoir en télévision qu'à telle période les points de fidélité sont doublés. Mais l’enseigne Leclerc peut, elle, parler toute l'année de son "Ticket Leclerc" permanent. Le BVP ne s’étonnera donc pas d’éventuels cafouillages et le Conseil d’Etat reste sur ses gardes devant ces brèches.

Le 1er janvier 2007, dès 0h, les premiers spots télévisés des grands distributeurs devraient être diffusés. TF1 a décidé de leur réserver les deux premiers écrans de la nouvelle année et d'offrir les spots gratuitement en départageant, si besoin, les enseignes candidates par tirage au sort. TF1 souhaite ainsi conserver sa première place, elle qui s’accapare déjà plus de la moitié du gâteau de la publicité télévisée. L'impact sur les recettes de la chaîne devrait se situer autour de 100 à 120 millions d'euros supplémentaires l'an prochain, selon les estimations des agences médias que la chaîne reprend à son compte. TF1 attend donc une bonne année avec cet « effet distribution » doublé d’un "effet Coupe du Monde Rugby".
Le service public, dont les écrans publicitaires sont plus restreints que ceux de ses concurrents, estime être en mesure d'absorber 30 à 40 millions d'euros, soit 15 à 20 % de ce nouveau marché.
Dans moins d’un mois, la France sera donc sur un pied d’égalité avec ses homologues européens, mettant un terme une exception française dénoncée par la Commission européenne et achevant ainsi l’ouverture de quatre secteurs : l’édition littéraire, la presse, le cinéma et la distribution.

Francebourse.com - Alexandra Voinchet
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