Jour J pour l’avionneur européen. Après avoir annoncé que les parties dirigeantes d’Airbus, les deux coprésidents du conseil d’administration, Manfred Bischoff et Arnaud Lagardère, et les deux coprésidents exécutifs, Louis Gallois et Thomas Enders, étaient parvenues à un compromis sur le plan d’assainissement Power 8, la deuxième mouture de ce plan doit être présentée aujourd’hui par Louis Gallois, le co-président d’EADS, la maison mère, et président d’Airbus, à Toulouse.
Selon les rumeurs, Power 8 devrait prévoir 10 000 suppressions d’emploi sans licenciement sec (5 000 emplois internes et 5 000 emplois contractuels, de sources industrielles). Cela corroborerait ce que disait le Premier ministre Dominique de Villepin le 20 février dernier, sur RTL, et qui avait alors soulevé la colère des autorités allemandes.
Le groupe emploie 57 000 personnes, dont 22 000 en France et 21 000 en Allemagne.
Power 8 confirmerait également la suppression de plusieurs sites de production à parité entre la France et l’Allemagne.
Il serait aussi prévu un doublement des externalisations, de 25 % à aujourd’hui à 50 %.
Fin de l’attente ?
Cette deuxième version, qui sera connue dans ses détails en début d’après-midi, a été arrachée après une longue semaine de tension entre Arnaud Lagardère et l’Etat français d’une part et le gouvernement et les actionnaires allemands de l’autre. Initialement le plan Power 8 devait être présenté le 20 février mais, le 19, il était reporté sine die faute d’accord entre la France et l’Allemagne sur la répartition industrielle de la charge de travail du futur long-courrier A350 XWB.
La semaine a également été marquée par la rencontre, le 23 février, entre le président de la République, Jacques Chirac, et son homologue allemande, la Chancelière Angela Merkel, qui avaient tous deux appelé à un règlement « équitable » de la crise et d’un partage équitable des « sacrifices ».
Power 8, le programme proposé par Christian Streiff avant son départ précipité, vise à économiser cinq milliards d’euros d’ici à 2010 et devrait « générer 2,1 milliards d’euros de contribution annuelle d’EBIT à partir de 2010 ». Il s’agit avant tout de réduire la dépendance de l’avionneur au dollar, de supporter les coûts supplémentaires de l’A380 et les futurs besoins de financement à quelques mois de la livraison de l’avion géant, du lancement industriel de l’A350 et de la hausse des cadences de production de l’A320. Il s’agit aussi de réduire les frais de fonctionnement de 30 % et de diminuer la part trop importante des fabrications réalisées en interne (75 %) et qui prive Airbus de grands partenaires capables de partager les risques, d’optimiser le dispositif industriel, fort de 16 usines et de 1 500 sous-traitants. Ceci dans un contexte de vive concurrence avec le constructeur américain, Boeing.
Power 8 impliquera donc une profonde restructuration des méthodes de travail et de gouvernance en vigueur dans les quatre pays du consortium, la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et l’Espagne.
Mais l’annonce de ce plan ne devrait guère calmer les esprits. Un mouvement de grève à l’échelle européenne est d’ores et déjà prévu, prévient FO, le syndicat majoritaire chez Airbus en France. Hier, les 1 300 salariés du site de Méaulte, en Picardie, qui, selon les rumeurs, figurait sur la liste noire, ont cessé le travail, tandis que la colère grondait à Saint-Nazaire.
Un comité central d’entreprise (CCE) et un comité européen doivent se tenir aujourd’hui.
