Présidentielle : FN et PCF, les deux grands perdants
Article du 23/04/2007
Parmi les leçons à retenir de ce premier tour de la présidentielle, il y a la débâcle du Front National à un extrême de l’échiquier politique et le délitement du vote communiste à l’autre.
Après son admission au second tour en 2002, Jean-Marie Le Pen faisait planer une ombre menaçante sur la campagne. Après avoir crié victoire il y a cinq ans, le leader FN déchante aujourd’hui. Avec un score de 10,51 %, Jean-Marie Le Pen revient en dessous de son niveau de la présidentielle de 1988. En pourcentage, il est revenu au niveau des élections européennes de 1984 (10,9 %), qui avaient marqué le début de son ascension politique.
Il n’y a qu'en 1974 qu’il avait fait pire, avec environ 200 000 voix (0,74 %). « C’est la fin d'un cycle, le FN est revenu à son niveau des élections européennes de 1984 », a estimé le politologue Jean-Yves Camus. Pour ce spécialiste de l’extrême droite, la cause de ce recul est à rechercher dans le taux de participation historique au scrutin, et plus encore dans la campagne de Nicolas Sarkozy, dont la stratégie de séduction des électeurs du FN « s’est révélée payante ».
Selon les instituts de sondage, de 21 à 29 % des électeurs de Jean-Marie Le Pen en 2002 auraient cette fois-ci voté pour Nicolas Sarkozy. De 5 à 9 % auraient choisi François Bayrou et 4 % Philippe de Villiers.
Aujourd’hui, les dirigeants frontistes se sont réunis pour faire le point sur une situation complètement inattendue. Reste deux grandes échéances au FN. Le 1er mai pour le discours du leader frontiste qui devrait alors annoncer sa position pour le second tour bien qu’il n’ait pour l’heure pas appelé à voter Nicolas Sarkozy, bien au contraire.
Et les législatives : un pour un parti qui n’a jamais réussi, à deux exceptions près, à faire élire des députés au scrutin majoritaire.
L’échec de la campagne 2007 risque également de peser lourd dans la vie interne du parti, où les fissures se multiplient. Marine Le Pen, la fille du dirigeant, risque d’être mise en porte-à-faux vis-à-vis de la vieille garde frontiste. « Soit Le Pen et sa fille tirent les conclusions de ce qui s’est passé, soit Le Pen va finir là où il a commencé », estimait un cadre du FN, sous couvert d’anonymat.
Le PCF a-t-il un avenir sur la scène politique française ?
Le PC en est plein délitement avec seulement 1,94 % des voix, tombant à un nouveau plus bas historique. Dès l’annonce des résultats, Marie-George Buffet a mis en cause le « vote utile » en faveur de la socialiste Ségolène Royal, tout en appelant à voter pour elle au second tour.
Le Conseil national (Parlement) du parti doit se réunir demain pour passer au crible ces résultats catastrophiques. Mais déjà, les divisions s’étalent et la direction est visée. L’ancien numéro un, Robert Hue, dont le score de 3,37 % en 2002, avait été déjà jugé calamiteux, prend sa revanche et multiplie les critiques à l’encontre de la « stratégie » d’alliance antilibérale tentée par la direction.
De son côté, le député-maire de Vénissieux André Gerin, chef de file d'une tendance orthodoxe opposée également à la stratégie d’lliance antilibérale, a violemment attaqué la direction. « Le PCF s’écroule, l'équipe du Colonel Fabien a largué l’identité du PCF : elle est discréditée et devient illégitime », accuse-t-il. Et appelle à la tenue à la mi-juin, après les législatives, d’un « Congrès extraordinaire » du PCF.
A elle seule, la déroute du Parti Communiste témoigne de la balkanisation du vote de gauche. Seul candidat à tirer son épingle du jeu à l’extrême gauche, Olivier Besancenot est pourtant loin derrière les quatre premiers candidats, avec 4,11 % des suffrages, soit moins que son précédent score en 2002. Le candidat de la LCR est pourtant celui qui s’en sort le mieux de ce côté de l’échiquier politique.
Dominique Voynet affiche un score de 1,57 % pour les Verts. Et Arlette Laguiller, qui se présentait pour la sixième et dernière fois sous les couleurs de LO, n’a rassemblé que 1,34 % des votants, une première depuis 1974. L’altermondialiste José Bové a séduit 1,32 % des électeurs, Gérard Schivardi, soutenu par le PT, 0,34 %. Frédéric Nihous, candidat des chasseurs, qui se dit ni de gauche ni de droite, obtient 1,15 %, très loin des quelque 4% de Jean Saint-Josse en 2002, et rate son objectif avoué de battre les Verts.
D’une manière générale, les « petits » candidats sont restés en fait bien insignifiants. L’extrême gauche semble donc avoir perdu son aura et son électorat lors de grands rendez-vous nationaux.