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Libye : Les intérêts de la France

Article du 25/07/2007
461 millions de dollars. Tel est le coût de la libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien qui ont retrouvé hier la liberté après huit années d’emprisonnement en Libye. Une somme versée par la fondation Kadhafi, présidée par le fils du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, Seif al-Islam, qui a permis de trouver un compromis financier avec les familles des victimes. Mais à travers la fondation ce sont indirectement l’Europe et la France qui se sont engagées financièrement. Les 461 millions d’euros versés devraient en effet être en grande partie remboursé par le Fonds spécial d'aide de Benghazi, créé en 2005 par Tripoli et Sofia, et dont font partie l’Union européenne, le Qatar ou encore les Etats-Unis.
Pourtant hier, Nicolas Sarkozy a assuré que « ni la France, ni l'Europe » n'avaient versé le moindre euro pour obtenir la libération des otages.
Mais un accord financier signé le 15 juillet et cité par Libye semble dire le contraire. Selon l'article premier du mémorandum, « l'UE s'engage à ce que le Fonds international de Benghazi reverse au Fonds de développement économique et social les sommes collectées dans le cadre de l'accord de financement du 15 juillet et son annexe, dont le montant s'élève à 598 millions de dinars libyens (soit 461 millions d’euros) » L'article 2 ajoute : « l'Union européenne garantit le traitement des enfants qui ont besoin de soins spécialisés dans des hôpitaux européens, sur fonds de l'UE et des États membres » ; et « la France s'engage à équiper le nouvel hôpital de Benghazi et apportera son concours technique à sa mise en service ».
2,5 millions d’euros ont été déjà versé par Bruxelles, entre 2005 et 2007, pour la rénovation de l'hôpital de Benghazi.
Mais au-delà de l’aide humanitaire, ce nouvel accord va surtout permettre de normaliser les relations entre l'UE la Libye.
L’accord prévoit en effet « un accès le plus large possible des exportations libyennes vers le marché européen », notamment des « produits agricoles et de la pêche » ; « une aide technique et financière dans l'archéologie et la restauration » ; la fourniture d'un « dispositif pour la surveillance des frontières libyennes » ; des « bourses d'études et de formation pour les étudiants libyens dans les universités européennes dans tous domaines » ; et des « visas Schengen de classe A aux ressortissants de la Grande Jamahiriya (...)». Ainsi la Libye sera largement remboursée des frais de dédommagement qu’elle a versé aux familles de victimes.

Partenaire commercial

Mais l’intérêt stratégique de l’Europe et de la France est clair. La Libye représente en effet un potentiel commercial important, notamment en matière énergétique. Gros producteur d'hydrocarbures, le pays ouvre ses portes aux investisseurs et tente de rattraper son retard après une décennie d'embargo.
Le président Nicolas Sarkozy, qui doit rencontrer ce mercredi le dirigeant libyen Kadhafi, n'a d'ailleurs pas caché ses ambitions mardi lors d'une conférence de presse à la suite de la libération des infirmières bulgares. « Des accords de coopération avec la Libye, j'espère qu'on en signera bien évidemment. Les Etats-Unis l'ont fait (...) Je ne vois pas au nom de quoi la France serait le seul pays à ne pas signer ce type d'accord », a-t-il commenté.
La France est le 6e fournisseur de ce pays de 6 millions d'habitants, qui reste un partenaire modeste (0,1% des exportations et 0,45% des importations), même si les échanges bilatéraux progressent rapidement. Les importations françaises en provenance de Libye totalisaient en 2006 1,9 milliard d'euros, en hausse de 19,4% sur un an et quasi entièrement constituées d'hydrocarbures, et les exportations atteignaient 433,6 millions (+43%). Pour l'ensemble de l'Union européenne, les importations représentent 25,76 milliards d'euros et les exportations 3,66 milliards.
Ces transactions bénéficient largement de la normalisation des relations entre la Libye et la communauté internationale, dans laquelle la promesse du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi de ne pas développer la bombe atomique a marqué un tournant en 2003.
Cette même année, le Colonel Kadhafi avait aussi tourné la page du socialisme avec un plan de privatisation concernant 375 sociétés publiques, principalement dans le domaine stratégique de l'énergie.
La Jamahiriya (« République des masses »), troisième producteur de pétrole africain, est assise sur d'importantes réserves gazières et minières inexplorées.
De quoi attirer la convoitise des compagnies occidentales. Certaines majors pétrolières qui avaient quitté le pays pendant la décennie d'embargo sont revenues, à l'instar de la britannique BP, qui a signé fin mai un accord gazier de 900 millions de dollars.
Tripoli a également lancé début juillet un important appel d'offre d'exploration gazière auquel Total, qui n'a jamais quitté la Libye, entend participer.
La France nourrit également des ambitions dans le nucléaire. Elle a signé avec Tripoli l'an dernier un protocole d'accord en recherche nucléaire civile, qui ouvrait la porte à une « participation » des sociétés françaises.
De nombreux autres secteurs sont aujourd'hui concernés par les privatisations: l'agriculture, la chimie, la métallurgie et la téléphonie. Ainsi la Libye pourrait représenter d’importants marchés pour les grandes entreprises françaises.

Francebourse.com – Manuelle Tilly, avec AFP
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