Autre record historique hier, cette fois du côté de l’or noir. Les cours du brut ont amélioré leur record historique en progressant encore au-delà de 80 dollars à New York et en flirtant avec les 78 dollars à Londres.
Plusieurs facteurs là aussi à cette flambée. La décision de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) mercredi de pomper à partir du 1er novembre 500 000 barils de plus par jour qu’elle ne le fait actuellement reste entourée de scepticisme. Le cartel s’est finalement résolu à porter ses objectifs de production à 27,2 millions de barils (mbj) par jour, soit une augmentation de 1,4 mbj.
La production des 12 pays membres s’élève à environ 30,5 millions de barils par jour (mjb), y compris l’Irak et l’Angola, nouveau membre qui n’a pas encore été doté d’un quota. La production des 10 pays soumis aux quotas est officiellement fixée à 25,8 mbj.
Il y a encore une semaine, une telle décision de relever les quotas de production semblait exclue. Mais l’OPEP ne fait que régulariser une situation de fait : ses pays membres produisent déjà officieusement près d’un million de barils de plus que la cible officielle.
Cette mesure permet en outre à l’Arabie Saoudite de ménager leur relation privilégiée avec les Etats-Unis, particulièrement affectés par la crise immobilière et financière actuelle. Les faucons du cartel, l’Iran et le Venezuela, qui produisent déjà à pleine capacité, ont eux sans doute accepté à contre-coeur la hausse : elle devrait peser sur leurs recettes pétrolières si les prix retombent et ils ne sont pas non plus enclins à faire de cadeau à Washington.
L’OPEP a voulu tenir compte de « la forte demande hivernale (qui) exige d’approvisionner suffisamment le marché » , dixit le secrétaire général de l’organisation, Abdullah el-Badri.
Et il s’agit là de l’autre facteur expliquant la progression des cours. Si le pic de consommation estival est passé, les analystes ont les yeux rivés sur l’état des stocks mondiaux au quatrième trimestre, qui coïncide avec une forte demande de produits de chauffage dans l’hémisphère nord.
Mercredi, le département américain de l’Energie (DoE) a annoncé une baisse de 7,1 millions de barils des stocks américains de brut lors de la semaine achevée le 7 septembre, presque trois fois plus importante que les attentes.
L’Agence américaine d’information sur l'énergie (IAE) estime par exemple que la demande mondiale de pétrole sera de 1,8 million de barils par jour supérieure à son niveau de l’an dernier pendant le second semestre 2007.
Et malgré le geste de l’OPEP, cette production supplémentaire est trop faible et ne parviendra aux marchés qu’à la fin de l'hiver, trop tard pour répondre à la hausse de la demande, jugent les analystes.
Le scénario du second semestre 2007 devrait donc être bien différent de celui de l’an passé.
Les cours avaient subi une nette correction à la baisse en décembre, la douceur inhabituelle de l’hiver dans l’hémisphère nord ayant détendu la demande et fait penser aux courtiers que le marché était sur-approvisionné. En septembre 2006, les prix du pétrole étaient déjà sur le déclin, une tendance saisonnière habituelle puisque la demande marque en général une pause au troisième trimestre, phase de transition.
Rien de tel cette année. Les cours ont repris 60 % depuis leur bref passage sous les 50 dollars le baril en décembre et ils évoluent nettement au-dessus de leur niveau de l’an dernier à pareille époque, quand un baril coûtait 63 dollars à Londres, et un peu plus de 64 dollars à New York.
Mercredi, réunis à Vienne, les pays membres de l’OPEP étaient en définitive confrontés à un dilemme. Etre accusés d’aggraver la crise économique actuelle en ne faisant rien alors que les prix du brut flirtent avec les 80 dollars. Ou voir se reproduire le scénario cauchemardesque de la crise asiatique : le cartel avait relevé sa production de 10 % pour finalement voir le prix du baril s’écrouler jusqu’à 10 dollars en 1999. Ou encore le recul brutal des prix au deuxième semestre 2006 : ils étaient tombés de plus de 78 dollars pendant l’été à moins de 50 dollars à la mi-janvier.
Last but not least, dernier facteur haussier, les investisseurs cherchent à déterminer l'impact que pourrait avoir sur les infrastructures pétrolières du golfe du Mexique la tempête tropicale Humberto, qui avait touché terre hier sur le Texas et la Louisiane sous forme d'un ouragan de catégorie 1 (sur une échelle de 5). A Port-Arthur, trois raffineries ont été fermées.