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L’or noir mérite bien son nom

Article du 26/10/2007

Le baril de pétrole vole de record en record. A 92,22 dollars ce vendredi matin, le baril de brut léger américain s’envole vers de nouveaux sommets, porté par un contexte économique et géopolitique bien particulier. Le baril de Brent de la Mer du Nord n’est pas en reste puisqu’il a dépassé les 89 dollars.
Le reflux du pétrole à moins de 90 dollars en milieu de semaine aura été de très courte durée. Hier à New York, le baril de « light sweet crude » pour livraison en décembre est monté jusqu’à 90,60 dollars, dépassant largement sa précédente marque de référence de la semaine dernière, de 90,07 dollars.
Depuis mercredi, la tendance est donc plus que jamais haussière pour le pétrole. Les statistiques américaines sont en effet venues raviver les craintes des opérateurs occidentaux. De fait, depuis l’annonce d’une baisse inattendue des stocks américains de brut, la flambée de l’or noir se chiffre à six dollars le baril. Les réserves de brut des Etats-Unis ont reculé de plus de 5 millions de barils la semaine dernière, celles de produits distillés (diesel et le fioul de chauffage) de 1,8 million de barils, celle d’essence de 2 millions de barils. Une baisse surprise.

Un contexte difficile

Les marchés s’inquiètent aujourd’hui plus que jamais de l’approvisionnement de l’hémisphère Nord en pétrole cet hiver, période de pic de consommation de produits de chauffage. A l’OPEP, l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole, qui gère une grande partie de la production d’or noir, les responsables ne laissent entrevoir aucune hausse de la production lors de leur rencontre informelle le mois prochain en Arabie saoudite.
Le cartel avait décidé en septembre d’augmenter au 1er novembre sa production de 500 000 barils par jour. Selon le Wall Street Journal, son secrétaire général Abdallah El-Badri a affirmé que le cartel ne parlait pas d’une autre augmentation. « Les cours élevés ne proviennent pas d’une insuffisance de la production », martèle ministre algérien de l’énergie, Chakib Khelil.
Enfin, le contexte géopolitique n’est pas en reste. Les tensions entre l’Irak et la Turquie sur le Kurdistan pourraient menacer une partie de la production de l’Irak et une zone d’acheminement importante. Selon le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, une intervention de la Turquie dans le nord de l’Irak aura lieu dès que « la situation l’imposera », pour déloger de leurs bases les rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).
Les affrontements armés n’ont pour l’heure pas affecté le transit du pétrole irakien via la Turquie, rapportent les analystes du secteur, mais il est à craindre que cette région soit encore plus déséquilibrée par une initiative militaire turque.
Les investisseurs s’alarment aussi des tensions entre l’Iran et la communauté internationale. Washington a imposé hier des sanctions aux militaires iraniens, dont une unité d’élite de l’armée, et à trois banques détenues par l’Etat, accusées de soutenir le terrorisme.
« C’est une combinaison de nombreux facteurs qui pousse ce marché tellement plus haut », a commenté Phil Flynn, analyste d’Alaron Trading. Le marché s’inquiète en effet du recul, important et inattendu, des réserves américaines, des nouvelles sanctions décidées par Washington contre l’Iran et des tensions au Kurdistan irakien. Ces tensions géopolitiques continuent de fournir une excuse aux courtiers pour acheter.

Un baril à 100 dollars

Autant de facteurs donc qui poussent le baril vers les 100 dollars, un seuil symbolique qui paraissait très lointain il y a quelques années encore. Pourtant, les prix du pétrole ont plus que quadruplé depuis le début de l’année 2002. Pour l’année en cours, la hausse est de 45 %. Le baril de pétrole est passé de 30 dollars en 2003, à 50 dollars en 2004, à 70 dollars en 2005, et 80 dollars en 2007. Et peut-être 100 dollars selon le scénario « Pétrole à 100 dollars en 2008 » de la banque CIBC.
Au début du mois d’octobre, Ben Tscocanos, analyste chez Standard and Poor’s, jugeait qu’un baril à 80 dollars était la dernière étape avant les 100 dollars, car l’OPEP n’a pas les capacités nécessaires pour augmenter sa production.
En France, le Centre d’analyse stratégique (CAS) prévoit aussi, dans un rapport récent, un baril à ce niveau, mais pas avant 2015, sous l’effet de la « raréfaction progressive des ressources » dans le monde. Notant que l’OPEP se montre désormais « très vigilante » pour empêcher les prix de repartir à la baisse, il émet trois hypothèses « hautes » sur les prix des énergies : un baril de brut entre 50 et 80 dollars jusqu’en 2015, entre 100 et 150 dollars de 2015 à 2030 et d’environ 100 dollars au-delà.

Une demande croissante, des ressources limitées

Les Etats-Unis sont sans surprise les plus gros consommateurs de pétrole. En 2006, ils ont englouti à eux seuls 24,1% du pétrole consommé dans le monde pendant l’année. L’Union Européenne 18,2 %, l’Amérique latine 8,3 %, le Japon 6 % et l’ex-Union soviétique seulement 4,8 %.
Mais il ne faut pas oublier la demande galopante de la part des économies émergentes. La croissance chinoise s’est révélée très gourmande en pétrole. En 2006, le géant asiatique a consommé 8 % du pétrole, 6,7 % de plus qu’en 2005 ! Et la tendance n’est pas prête de s’inverser. La Chine produit 3,5 millions de barils par jour mais en consomme le double, selon la CIBC. Son boom économique, tout comme celui de l’Inde, de la Malaisie et de la Thaïlande contribue à doper les cours du brut.
Selon l’étude de la CIBC, en 2006 toujours, la consommation quotidienne des pays membres de l’OPEP, plus celle des grands pays pétroliers que sont le Mexique et la Russie, a dépassé 12 millions de barils par jour.
La demande se maintient donc à des niveaux record dans le monde entier, malgré certains efforts en Europe de l’Ouest pour la réduire – les prix à la pompe aidant.
Face à cela, il faut bien se rendre à l’évidence que l’épuisement de l’or noir guette. Les réserves mondiales prouvées (1 200 milliards de barils selon The BP Statistical Review of World Energy 2007) peuvent encore permettre de tenir, au rythme actuel de consommation – donnée faussée donc puisque la demande tend à augmenter -, pendant près de 40 ans. Sans compter sur la découverte de nouveaux gisements grâce à de nouvelles technologies. Les experts situent actuellement le pic de production de pétrole entre 2010 et 2035. Après ce « peak oil », la production mondiale devrait, lentement, décliner. Et les prix monter…

Francebourse.com – Alexandra Voinchet, avec AFP
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