EADS, avec son partenaire américain Northrop Grumman, devra très probablement concourir à nouveau face à Boeing dans la compétition pour fournir des avions ravitailleurs à l’US Air Force.
La Cour des comptes américaine (GAO) vient de rendre son avis à l’issue d’un examen de trois mois de la procédure : selon elle, l’armée américaine a commis des erreurs d’évaluation. Ce jugement donne ainsi raison à Boeing qui contestait les conditions d’attribution par le Pentagone d’un méga-contrat d’avions ravitailleurs à l’européen EADS et son partenaire américain Northrop.
Le GAO note sept points qui ont pu, à son sens, fausser la compétition. En particulier, la Cour a noté que Boeing était moins cher que son rival sur toute la durée de vie du programme, après correction de certaines erreurs mises au jour lors de l’examen.
La Cour, dont l’avis est pratiquement toujours suivi par les pouvoirs publics, recommande à l’Air Force de « rouvrir les discussions » avec les deux compétiteurs, « d’obtenir des propositions révisées, de réévaluer les propositions et de prendre une nouvelle décision sur la sélection de son fournisseur, cohérente avec (sa) décision ».
L’armée de l’Air américaine a annoncé son intention d’étudier ces conclusions avant de décider ou non de relancer la compétition. Elle a 60 jours pour informer la Cour des actions qu’elle compte entreprendre. « L’Air Force fera le plus vite possible afin que l’Amérique s’équipe de cette capacité urgemment requise », a commenté la responsable des acquisitions de l’armée de l’Air, Sue Payton.
Cette recommandation, qui constitue un revers cinglant pour l’armée de l’Air et pour EADS est le dernier épisode d’une histoire aux multiples rebondissements. Cette compétition - à haute teneur politique - a opposé pendant des années le KC-45, version militarisée de l’A330 d’Airbus, et le KC-767, dérivé du 767 de Boeing. En 2003, un contrat de 35 milliards de dollars avait déjà été attribué à Boeing avant d’être annulé pour fraude et avait valu la prison à deux cadres de l’avionneur. Le contrat avait ensuite été remis en jeu en 2006. Le 29 février, l’armée de l’Air avait finalement choisi EADS et Northrop pour fournir 179 avions ravitailleurs. Principal fournisseur de l’US Air Force en avions ravitailleurs, Boeing était donné comme le grand favori. Son échec a provoqué un tollé dans les rangs politiques et syndicaux, au nom de la préférence nationale et des emplois « volés » par un groupe étranger. Cette décision avait suscité une levée de boucliers protectionnistes au sein du Congrès.
L’annonce du GAO risque de retarder encore une fois le renouvellement d’une flotte vétuste de « stations-service volantes », d’au moins un an selon les experts.
Le président exécutif d’EADS, Louis Gallois, a avoué sa « déception » tout en réaffirmant que l’appareil proposé avec Northrop était de son point de vue « le meilleur ». « Nous accueillons et soutenons la décision du GAO aujourd’hui qui reconnaît le bien-fondé de notre plainte » et « sommes impatients de travailler avec l’armée de l’Air », s’est de son côté félicité Mark McGraw, vice-président de Boeing, en charge des programmes d’avions ravitailleurs.