Notre lettre confidentielle a 24 ans! Par Jean-David Haddad
Article du 03/11/2025
Vingt-quatre ans.
Voilà le temps qu’a traversé La Quinzaine de FranceBourse depuis sa première parution, en ce 1er novembre. Vingt-quatre ans, c’est presque une génération, et pourtant, je me souviens parfaitement de la première lettre.
La valeur mise en avant s’appelait Maurel & Prom. Elle avait été choisie parce que je voyais dans cette petite société pétrolière française une énergie rare, une ambition singulière. Le titre avait été multiplié par dix dans les années qui ont suivi. Certains diraient que c’était un coup de chance mais c’était le signe d’une méthode.
Si La Quinzaine existe encore, si elle continue à progresser, à être lue, commentée, débattue, c’est parce qu’elle repose sur une véritable architecture qui est celle d’un portefeuille construit pour absorber les chocs, encaisser les erreurs, traverser les tempêtes sans sombrer. J’ai toujours considéré qu’un portefeuille n’était pas un château de sable mais une cathédrale patiemment élevée.
On y taille la pierre des convictions, on y ajuste les arcs-boutants des pondérations, on y redresse les piliers de la diversification. C’est cela qui permet à l’ensemble de tenir, même quand les vents se lèvent. Nous avons connu des mauvaises passes, évidemment. Tout investisseur sincère en connaît. Ceux qui prétendent l’inverse vous mentent.
L’analyse boursière n’est pas une science exacte, c’est une discipline imparfaite qui repose sur des probabilités, des narratifs, des intuitions rationnelles. Mais c’est justement parce que je sais que l’analyse est imparfaite que j’ai toujours bâti mes portefeuilles pour résister à l’imperfection. Une structure pensée, équilibrée, cohérente : c’est cela qui protège, et qui, sur la durée, permet la croissance. Je n’ai jamais fonctionné sur le principe des “tuyaux”. D’abord parce qu’ils sont illégaux. Ensuite, parce qu’ils sont le plus souvent des intox, des récits fabriqués pour manipuler les espoirs des naïfs. Ce n’est pas ma vision de la bourse. Mon travail n’a jamais été de fournir des promesses, mais de construire des cadres d’intelligence économique et de patience.
La bourse, pour moi, c’est un art du temps long, mêlé à la lucidité du court terme. En vingt-quatre ans, notre portefeuille a été multiplié par dix. Le CAC 40, lui, a été multiplié par deux. Cela dit tout. Ce n’est pas une performance de conte de fées, ce n’est pas un “x100” ou un “x200” qu’on voit circuler dans les publicités ou sur les réseaux tel du rêve vendu sous cellophane. C’est du réel, du tangible, du mesuré. C’est la performance d’un portefeuille pensé, géré avec prudence mais avec conviction, qui sait spéculer sans se perdre, qui sait patienter sans s’endormir. Je ne promets jamais la lune, mais la constance. Et c’est peut-être cela, la vraie leçon de ces vingt-quatre années : la solidité l’emporte toujours sur la frénésie, la méthode sur la rumeur, la structure sur la technique. Ceux qui m’accompagnent depuis le début le savent bien : la bourse, ce n’est pas courir après les miracles, c’est bâtir, pierre après pierre, la liberté.