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Transport aérien : La menace du pétrole cher

Article du 02/06/2008
Le renchérissement du pétrole n’est pas sans inquiéter les acteurs du transport aérien.
Mi-mai, le responsable pour l’Europe de la compagnie aérienne irlandaise à bas prix Ryanair, Michael O’Leary, se faisait mauvais prophète. Selon lui, il faut s’attendre à une vague de faillites dans le secteur aérien en raison de l’envolée des prix du pétrole, estimait-il dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung.

Une facture carburant de plus en plus lourde

Les prix élevés du pétrole brut et du kérosène exercent une pression forte sur les compagnies aériennes. Le poste carburant se taille la part du lion dans les dépenses des transporteurs alors que les cours du pétrole évoluent à des niveaux record, entre 130 et 135 dollars le baril.
L’Association internationale du transport aérien (IATA) a donc révisé ses prévisions pour les transporteurs, lors de l’ouverture de son assemblée générale. Elle table désormais sur une perte de 2,3 milliards de dollars. En avril, l’IATA espérait encore un bénéfice de 4,5 milliards de dollars pour 2008, après 5,6 milliards en 2007 - les premiers bénéfices depuis l’an 2000.
Mais « la situation a changé dramatiquement ces dernières semaines. Un pétrole qui est monté au-dessus de 130 dollars par baril nous a mené dans un territoire inconnu. Si l’on y ajoute l’affaiblissement de l’économie mondiale, nous avons tous les éléments pour une nouvelle tempête » sur les compagnies aériennes, estime le directeur général de l’IATA.
Chez les grandes compagnies aériennes américaines qui étaient redevenues timidement rentables l’an dernier après, pour la plupart, avoir fait faillite à la suite du 11 septembre 200 mais qui sont toutes devenues déficitaires avec l’envolée des cours du pétrole, tous les moyens sont bons pour faire des économies de bout de chandelle : renchérissement du prix des vols, maximisation des places disponibles dans les avions, suppression de certaines liaisons voire remplissage calculé à quelques gouttes près des réserves de carburants des appareils.
Toutes ont expliqué que leur facture de carburant a augmenté d’environ 50 % par rapport au premier trimestre 2007, ce qui se traduit par des dépenses supplémentaires de plusieurs centaines de millions de dollars. Et prévoient un impact encore plus massif pour l’ensemble de 2008 alors que le baril de pétrole frôle les 120 dollars, un doublement en un an.
Continental a averti que sa facture de carburant augmenterait de 1,5 milliard de dollars cette année, Northwest Airlines s’attend à une hausse de 1,7 milliard - plus de deux fois son bénéfice 2007 - et American prévoit une hausse de 2,6 milliards, pour atteindre à 9,3 milliards au total.
Le carburant est devenu leur premier poste de dépenses, devant la masse salariale, et selon la banque d’affaires Merrill Lynch, toutes les compagnies nationales seront déficitaires en 2008, avec une perte courante cumulée d’au moins 1,6 milliard de dollars voire davantage si le pétrole continue d’augmenter.

Restructuration du paysage aérien

Déjà, beaucoup de petites compagnies n’ont pas résisté. Les faillites se sont multipliées avec la fermeture récente de Frontier Airlines, Skybus, ATA, Aloha Airlines ou encore Champion Air. Soit près de 4 600 licenciements en tout. D’autres pourraient suivre, comme EOS, Sun Country, USA 3000 et même Virgin America.
Les grosses compagnies veulent elles limiter les dégâts. Delta Air Lines, troisième compagnie américaine, et Northwest Airlines, cinquième, vont elles créer la première compagnie aérienne américaine sous le seul nom de Delta. Les deux groupes sont géographiquement complémentaires. Combinées, les deux compagnies auront accès à 390 destinations dans 67 pays, avec un chiffre d’affaires cumulé de 35 milliards de dollars, une flotte de près de 800 appareils et environ 75 000 salariés dans le monde.
Cette opération devrait coûter, en un paiement unique, moins d’un milliard de dollars mais rapporter des synergies d’un milliard de dollars par an. De quoi résister en partie à la hausse vertigineuse du pétrole.
L’union de Delta Air Lines et de Northwest Airlines risque d’être la première d’une série de concentrations dans le secteur aérien américain, émietté entre une multitude de compagnies. La prochaine pourrait être celle de Continental et United. Toutefois, plusieurs fusions ont déjà échoué aux Etats-Unis devant l’impossibilité de réconcilier les intérêts contradictoires des pilotes des compagnies souhaitant se rapprocher.
A l’inverse, Continental Airlines a fait le choix de conserver son indépendance. Néanmoins, la quatrième compagnie aérienne américaine souhaite « continuer d’examiner de possibles alliances et son statut de membre de SkyTeam », l’alliance commerciale où est notamment présent Air France, a-t-elle déclaré.
D’autres compagnies adoptent des solutions plus « opérationnelles ». Certaines réduisent leurs capacités de transport à l’intérieur des Etats-Unis. C’est là où elles essuient les pertes les plus lourdes car la concurrence d’une myriade de compagnies à bas coûts (« low cost ») les ont empêchées jusqu’ici d’augmenter leurs tarifs. Les vols intérieurs américains vont ainsi se faire plus rares. Or, aux Etats-Unis, joindre Los Angeles à New York ne se fait que par les airs.
A l’inverse, la plupart veulent augmenter leurs vols internationaux, plus rentables grâce aux voyageurs d’affaires, mais la concurrence accrue y compris de la part des compagnie étrangères risque là encore de limiter leurs ambitions.
Les compagnies américaines veulent aussi augmenter leurs prix. Pas forcément avec des billets plus chers. Mais elles vont surfacturer une quantité de services : les bagages supplémentaires coûteront 10 à 50 dollars de plus, la réservation de sièges sera parfois payante, sans oublier la nourriture à bord, l’utilisation de la vidéo de bord...
L’emploi est aussi visé.
Solution plus radicale enfin, Continental a fait pression sur ses pilotes pour économiser du carburant sur des vols transatlantiques, ce qui a fait augmenter fortement en 2007 les demandes d’atterrissage d’urgence d’appareils dont le réservoir était presque vide, selon un récent rapport des autorités américaines, qui s’inquiètent de ce genre de procédés.

Francebourse.com – Alexandra Voinchet, avec AFP
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